Comme plusieurs entraîneurs qui travaillent en parasport, Nathalie Séguin est arrivée là un peu par hasard.
Nathalie Séguin a commencé son baccalauréat en kinésiologie, une science dont elle ignorait l’existence avant de la voir dans un cartable de programmes universitaires, avec en tête l’objectif d’ouvrir un centre de conditionnement physique accessible à tout le monde.
Curieuse, la jeune sportive avait recherché les activités physiques adaptées durant ses années de cégep. « J’ai découvert qu’il y avait vraiment une panoplie d’activités physiques adaptées, c’est juste qu’elles n’étaient pas aussi accessibles. Il y en a plein, mais on n’en offre pas plein. »
Une rencontre déterminante avec le parasport
Un travail en biomécanique du mouvement dès sa première année d’études a changé sa trajectoire. « J’aime ça être originale, ça aurait été plate de le faire sur la marche. J’ai pensé le faire sur un parasport que j’avais vu, mais je ne me rappelais plus du nom. Fait que j’ai cherché ‘aveugle’, ‘cloche’ et ‘ballon’ sur Google et ça m’a donné le goalball. »
Ça l’a amené à la rencontre de l’Association sportive des aveugles du Québec, puis de l’équipe de goalball de la ville. Elle a rencontré une gang d’athlètes passionnés qui riaient beaucoup. Elle a eu la piqure et elle est restée.
Et elle y est toujours. Aujourd’hui, Nathalie Séguin est entraîneure-chef des équipes masculines et féminines provinciales de goalball. Après avoir mis sur pied le volet de para-athlétisme de l’Université Laval, elle occupe maintenant aussi le rôle d’entraîneure-chef de l’équipe du Québec. Elle s’occupe en plus du développement des deux sports à travers la province.
La réalité d’être entraîneure en parasport
Nathalie Séguin ne prévoyait pas travailler en parasports, mais les occasions de carrière l’ont gardée dans le milieu.
Ce qu’elle aime par-dessus tout dans son rôle? « Ce n’est jamais plate. Il y a beaucoup de place pour la créativité, la curiosité. Les athlètes ont des objectifs différents, il y a une belle variété. »
Aussi, il y a quelque chose d’inspirant à aider ces athlètes, souvent laissés de côté ou avec un passé difficile, à s’émanciper. « C’est valorisant de voir une personne s’accomplir à travers le sport, au-delà du handicap. Le sport est adapté pour elle, donc ce n’est pas à elle de s’adapter. Ça, c’est rare. »
Mais, la liste de difficultés aussi est longue, admet Nathalie en riant, que ce soit les problèmes de financement, de recrutement ou les nombreuses tâches administratives supplémentaires qui en découlent.
« En goalball, sur mon équipe provinciale, j’ai 7 athlètes sur 8 qui ne voient pas du tout. Et je suis la seule entraîneure aux pratiques. Je ne peux pas leur donner un programme d’entraînement et ils vont au gym tous seuls, ça ne marche pas. Donc, il faut qu’on paie 2 ou 3 fois plus pour avoir le même résultat. »
Des relations basées sur l’écoute
Comment sont les relations entre coach et athlètes dans le parasport? « On va avoir plus d’annulations de pratiques. Il peut arriver des circonstances à la maison, des accidents, des choses comme ça qui font que tu finis par connaître leur vie quotidienne. »
Nathalie souligne l’importance d’être à l’écoute et de bien comprendre leur réalité et leurs besoins afin de bien adapter l’entraînement. Cela crée nécessairement une proximité, mais Nathalie essaie de garder une certaine distance malgré tout. « Ça reste que je suis leur coach. Ce n’est pas évident des fois parce que tu finis par les connaître tellement par cœur et ça s’entremêle. »
Une expérience paralympique à compléter
Nathalie Séguin a vécu une première expérience paralympique à Rio en 2016, comme entraîneure de l’équipe canadienne masculine de goalball.
« C’était un cas très particulier parce que je suis devenue l’entraîneure de l’équipe 3 mois avant les Jeux. Je ne les connaissais pas du tout. C’était une expérience incroyable et positive et ça a confirmé ma passion à rester dans le haut niveau, mais c’était très stressant. Pour être honnête, je ne me rappelle pas de tout. »
À Paris, la coach a pu assister comme spectatrice aux courses d’Anthony Bouchard, un athlète qu’elle entraîne en para-athlétisme depuis ses débuts il y a 2 ans et demi.
« C’était une expérience complètement différente. Ça a super bien été, on a pu voir que le travail de préparation avait été bien fait. Anthony a été capable de vraiment bien performer. Maintenant, on sait exactement ce qu’il faut travailler. Anthony est super motivé pour les 4 prochaines années. »
Nathalie aussi, puisqu’elle reste avec un sentiment inachevé et une volonté de vraiment vivre les Jeux paralympiques de l’intérieur en étant bien préparée.
Toujours plus loin
Quand on lui demande de quoi elle est la plus fière dans sa carrière, Nathalie admet en riant qu’elle n’est jamais satisfaite et veut toujours aller chercher plus loin. Mais elle est contente quand ses interventions donnent des résultats à long terme et font une différence dans la vie des gens.
Et pour la suite, est-ce que le gym accessible est toujours dans ses plans? « Il est encore dans ma tête, mais on dirait que ça va être un rêve inachevé. La société évolue, donc le besoin que je voyais il y a 20 ans est moins là aujourd’hui. »
Elle vise surtout à faire un cycle paralympique de 4 ans et d’amener pour la première fois un athlète individuel qu’elle suit depuis le tout début aux Jeux de Los Angeles en 2028. Mais elle sait que le monde du coaching pourrait lui réserver des surprises, donc elle y va une année à la fois.
Elle veut aussi motiver plus de coachs à s’impliquer dans le parasport. « S’ils se reconnaissent dans les qualités d’écoute, de curiosité et de créativité, ils vont faire d’excellents entraîneurs de parasport, même sans connaître le sport. Les athlètes sont tellement ouverts à partager leurs connaissances, leur passion. Ensemble, ils peuvent arriver à quelque chose de grand », conclut-elle.
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